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Matt04.pngLorsque leur voeu se réalisera? Je risquerai d'être bien loin.

 

Vous le savez bien, vous, qui accumulez les ans au sablier d'or, notre vie est parcourue de mauvais génies; qui ont souvent la mauvaise malice d'être attirants; irrésistiblement drôles, qui portent le négligé avec une grâce qui vous, vous échappe. Qui, selon toute apparence, n'ont aucun effort à faire pour accumuler les conquêtes.

 

Ils vous horripileraient bien, mais d'un coup , un coup pervers du sort, vous vous mettez à les aimer, à les désirer, à pleurer et à vous mordre lorsqu'ils manquent à l'appel; quand ils se montrent...absents.

 

Vous vous arracheriez bien les tripes, impuissants que vous êtes à vous défaire d'eux, quand bien même vous savez que cet arrachement est votre unique chance!!! Je ne vous dirais pas tout à fait que j'ai connu ça, puisque j'en suis un moi-même , de mauvais génie.

 

Allons, vous ne me reconnaissez toujours pas? Je porte le prénom donné par un écrivain illustre à un obscur romantique ; et je traîne ma maudite existence parmi les beaux corps et quelques fois, bien rares, les belles âmes... Pour les corps, mon désir est somme toute limité, car ce n'est pas sur le corps , aux emportements et aux oublis si prompts que mon empire capricieux trouve à s'exercer.

 

Non, donnez-moi des esprits, et des coeurs palpitants, et des âmes pleines de pensers absolus , d'idéaux. Ceux qui s'animent aux lumières du bonheur céleste sont aussi ceux , souvent, qui ont le corps ardent et qui ne s'épuisent pas.

 

Cherchez alors à les détourner de leur lumière, le feu de votre contrariant désir les charmera un temps, mais avec ceux-là vous ne serez pas vainqueurs. Ils se foutent bien et du trait brillant à fourbir dans l'instant mondain et du cynisme de mise dans vos cercles, et de la convenue répulsion pour les sentiments moites où l'on laisse sa peau. Vous croyiez qu'ils finiraient par vous ennuyer et ce sont eux qui vous plantent là, car votre élégante sécheresse de coeur ne trouve plus à les nourrir.

 

Oh, je sais très bien comment ça va se passer. Je m'imagine tout à fait sous le pelage d'argent du chartreux péteux qui va onduler sur le balcon et assister à leur poignantes retrouvailles.

 

Non, Noëlle ne sera pas en nuisette lamée à briquer par terre tandis que Mel arrive en chemise blanche et ray-ban avec un bouquet de roses. Ca vous vous en doutez, mais n'espérez pas non plus stichomythies à fleur de peau et tirades pleines de passion parce que, le kitschos en moins ( et les ardents se foutent bien de paraître kitsch, aussi!); ça revient à peu près au même en matière de dégoulinades sucrées; mon goût délicat s'y refuse.

 

Je fais mieux, ou pire. Lorsque Mel sera entré, plein de scrupules de faux derche pour s'être servi de la clé d'Ewald; il la trouvera avachie, là où le roi ne va que seul; en proie à une méga crise de foie, suite à l'absorption compensatoire de crabes en chocolat fourré au praliné pas trop frais chez une "copine".

 

Du coup, héhé, tous les effets sont coupés! Toute à l'évacuation salutaire de son dernier crabe, elle le gratifiera à peine d'un "hein,tu es là?" Elle aura la coiffure triste et molle bien que courte, le teint verdâtre, les yeux valdingués de gris, l'oeil torve et l'haleine brouillée.

 

Et malgré tout, en cet instant mélo de tête à tête avec le trône, ce sera bel et bien elle, inexorablement, plus vibrante et plus désirable que la plus apprêtée, la plus parfumée des tops modèles. Elle sera chiffonnée et fragile , prête à se rompre, avec toujours cette lueur déterminée de fauve cependant dans le regard; jamais elle n'aura été plus belle.

 

La nuit se finira sous les draps, mais paisible, dans cette écoeurante dévotion à son mal digestif, je gage qu'il lui aura fait chauffer une tisane, qu'il aura aéré, qu'un encens presque imperceptible brûlera dans sa lampe de sorcière et qu'il sera couché à côté d'elle en la caressant du bout des doigts, pour ne pas troubler le fragile rétablissement de ses organes.

 

Peut-on voir dans ce moment de tendresse discrète mais obstinée, la peau de Noëlle qui se dresse, les frissons de cette chair que des mains, des lèvres, un corps adore inlassablement jusque dans les heures dévolues au sommeil?

 

Je risquerai d'être bien loin; je n'aime pas quand des voeux s'exaucent. Surtout si les miens,à côté,  tombent dans la destinée comme dans une oreille morte.

Tag(s) : #Renan et Ewald
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